La gestion mentale, une voie d’accompagnement des jeunes à hauts potentiels

 

Par Françoise Dessy, Licenciée en logopédie, Certifiée UMons pour l’accompagnement des enfants et des jeunes à hauts potentiels en difficulté

 

Être différent implique la plupart du temps pour un enfant, un adolescent ou un adulte un parcours plein d’embûches, émaillé souvent d’incompréhension, de jugements et parfois même de réactions inadaptées. Les jeunes à hauts potentiels n’échappent pas à ces écueils qui peuvent constituer, dans certaines situations, une source de grandes souffrances intérieures et peuvent aussi être à l’origine de difficultés scolaires quelquefois très importantes. Ces difficultés sont alors autant de freins à un épanouissement de leur personnalité.

C’est pourquoi il est indispensable de reconnaître ces jeunes dans leur différence et d’aller à la rencontre de leur fonctionnement au travers d’un accompagnement qui soit dans le respect de ce qu’ils sont.

La gestion mentale constitue dans cette optique une voie particulièrement intéressante par le fait qu’elle rencontre des caractéristiques essentielles des personnes à hauts potentiels.

                                                           

 

Sans entrer dans les détails, la gestion mentale, développée par Antoine de La Garanderie, constitue, sur le plan pédagogique, une approche visant à permettre à la personne de découvrir par elle-même et pour elle-même ses propres stratégies mentales et surtout de les enrichir ; ceci en lui faisant prendre conscience de ce qu’elle fait mentalement mais aussi de ce qu’elle pourrait faire pour développer son potentiel et être plus efficace face aux apprentissages.

 

Or l’enfant précoce, qui emmagasine la plupart du temps les informations sans aucun effort, est rarement conscient des procédures mentales qu’il emploie, ce qui peut constituer une source de pénalisation dans de nombreux apprentissages. Il est donc fondamental de l’entraîner dès son plus jeune âge à prendre conscience de la manière dont il s’y prend pour acquérir ses connaissances. La gestion mentale, par le biais du dialogue pédagogique comme outil privilégié d’introspection, va ainsi constituer pour lui une aide non négligeable dans la découverte de ses stratégies mentales et donc du développement de son potentiel cognitif. Le dialogue pédagogique consiste en un jeu de questions-réponses permettant une recherche à deux des procédures que la personne utilise ou pourrait utiliser pour s’adapter à une tâche scolaire : par exemple, que fait-elle mentalement quand elle mémorise ? Outre la reconnaissance des ressources du jeune, il implique de la part de l’accompagnant, empathie, accueil inconditionnel et respect ; il est basé sur l’écoute active (reformulation par l’accompagnant de ce qui est dit par la personne).

 

En second lieu, la gestion mentale débouche sur une pédagogie du projet : A. de La Garanderie disait de l’être humain qu’il se caractérise par sa capacité à faire des projets. Il sera donc essentiel de guider tout enfant, et plus encore l’enfant précoce, dans l’anticipation de ses actes, de ses projets, de ses défis par un questionnement sur les moyens d’y parvenir. Ce sera pour lui, souvent économe quant à l’effort à fournir, l’occasion d’un entraînement continuel qui le rendra « acteur » de sa démarche, condition indispensable à la motivation et à une évolution positive.

 

À partir de cette notion de projet, la gestion mentale rencontre une autre particularité des enfants à hauts potentiels : il s’agit de la recherche de sens. En effet, celle-ci fait partie intrinsèque de leur fonctionnement, elle motive leur pensée et leur procure la sécurité. Tout doit avoir un sens. Or la gestion mentale est fondamentalement une approche basée sur ce concept puisqu’elle a pour mission de faire émerger ce qui fait sens pour une personne dans des situations d’apprentissage. Autrement dit, quels éléments parlent à la personne pour pouvoir être attentive, mémoriser, comprendre, réfléchir, imaginer ? La découverte de ce « sens » va lui permettre de (re)trouver une plus grande efficacité face à une situation donnée.

 

Le dernier apport de la gestion mentale retenu ici pour l’accompagnement des enfants précoces est qu’elle favorise l’installation d’une relation de dialogue avec les intervenants et avec les parents. L’enfant à hauts potentiels a besoin d’un cadre solide pour se sentir en sécurité, cadre dont il va sans cesse tester la solidité. Par ce fait, le risque est quelquefois grand de créer autour de lui des réactions plus ou moins négatives tant dans le milieu familial que scolaire. Or instaurer un climat de confiance est une condition essentielle d’une pédagogie adaptée : un enfant ne pourra apprendre que si les relations avec son entourage sont positives. Le dialogue pédagogique pratiqué en gestion mentale, de par les conditions dans lesquelles il doit être conduit mais également au travers de la notion même de projet qui remet l’enfant au centre de sa démarche, constitue un élément qui aide à poser les bases d’un dialogue dont la rupture peut être lourde de conséquences pour le jeune.

 

Au terme de ces quelques lignes, nous pourrions dire que la gestion mentale, si elle n’est en aucun cas la seule voie adaptée à l’accompagnement des jeunes à hauts potentiels sur le plan cognitif, constitue sans aucun doute un chemin intéressant à explorer avec eux dans le respect de leur fonctionnement.

  

Mais ce que nous devons avant tout garder à l’

 esprit pour aller à la rencontre du grand potentiel de ces enfants et de ces adolescents, c’est qu’il nous faut nous-mêmes développer notre esprit d’initiative et de créativité. Nous pourrons alors être découvreurs de ce qui est pour jeter les bases de ce qui n’est pas, et contribuer ainsi à donner à tous ces jeunes le goût de se créer eux-mêmes et de réaliser leur projet.

 

 Pour une première approche de la gestion mentale, je vous renvoie à l’ouvrage d’Antoine de La Garanderie  et Daniel Arquié « Réussir, ça s’apprend » Bayard Editions.

Pour une première approche de l’enfant à hauts potentiels, je vous renvoie à l’ouvrage de A. Adda « Le livre de l’enfant doué » Ed. Solar Famille.